Preuves

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PREUVES. L'usage des Preuves de noblesse paraît avoir commencé à l'occasion des tournois. On en a demandé ensuite pour l'admission dans les églises, chapitres, collèges, communautés, compagnies, et ordres réguliers et militaires, où l'on ne recevait que des nobles, et pour l'entrée aux États des provinces. La forme de ces Preuves a varié suivant les temps et les lieux. On l'a appelée testimoniale quand elle a été faite par des témoins jurés, et littérale quand elle a été constatée par des titres et documents.

L'étendue de la Preuve se mesure ou par le nombre des générations, ou par celui des siècles, ou enfin par l'intervalle compris entre le temps où elle est faite et l'époque fixe qui en est le terme. Dans le premier cas, on pourrait l'appeler graduelle, dans le second, séculaire, et dans le troisième, dative.

De la première espèce, sont celles que l'on exigeait pour l'admission dans les ordres du roi, dans celui de Saint-Lazare, dans plusieurs chapitres nobles, dans les places de lieutenants des maréchaux de France, et d'élèves des écoles militaires, et celles qu'on fait pour l'entrée au service de terre et de mer.

Les Preuves que faisaient les chanoinesses de divers chapitres, et les demoiselles des maisons royales de Saint-Cyr et de l'Enfant-Jésus sont de la seconde espèce.

Les Preuves qui étaient exigées pour obtenir les honneurs de la cour, les places de pages chez le roi et les princes, appartenaient à la troisième espèce.

Le nombre des degrés était fixé à quatre pour l'admission dans l'ordre du Saint-Esprit, de même que pour être agréé au service, aux places d'élèves des écoles royales militaires, et à celles de lieutenant des maréchaux de France. Il en fallait prouver neuf d'une noblesse ancienne, et sans principe connu, pour l'admission de l'ordre de Saint-Lazare. Je ne parle point de la forme des Preuves des divers chapitres nobles de France, parce que ce rejet est traité au long dans un ouvrage intitulé : La France chevaleresque, qui, à cet égard, ne laisse rien à désirer.

Les Preuves des sous-lieutenants des gardes-du-corps devaient être remontées à l'année 1400 sans anoblissement connu ; celles qu'étaient tenus de faire les pages remontaient à l'année 1550, également sans principe connu. Il fallait établir une Preuve de possession de noblesse de 140 ans, pour être admis dans la maison royale de Saint-Cyr ; il était nécessaire qu'elle fût de 200 ans, pour avoir entrée dans la maison de l'Enfant-Jésus.

Les honneurs de la cour n'étaient accordées généralement qu'à ceux qui pouvaient établir une possession de noblesse non interrompue, depuis l'année 1400, sans anoblissement.

On a considéré deux choses dans les Preuves, la filiation et la noblesse. La filiation se justifie par la production de titres authentiques qui expriment la liaison de chacun des degrés de la généalogie entr'eux, tels que les extraits de baptême ou de sépulture, les actes de partage, les contrats de mariage et les testaments. La noblesse se justifie par la représentation des titres, qui sont ou primordiaux, ou constitutifs, ou confirmatifs de la qualité, ou simplement civils et portant qualification.

Les titres primordiaux sont, à l'égard des familles anoblies, comme les lettres-patentes d'anoblissement ou comme les provisions de charges attributives de noblesse.

Les titres constitutifs sont, pour les gentilshommes de la province de Bretagne, les partages faits suivant l'assise du comte Geoffroi, et le gouvernement noble et avantageux, et en général pour ceux de toutes les provinces du royaume, les certificats de service dans l'arrière-ban, de séance dans l'ordre de la noblesse aux tenues des États, et d'exemption des taxes qui se lèvent sur les roturiers ; enfin les actes de foi et hommages rendus à la manière des nobles, ou les reprises de fiefs.

Les titres confirmatifs sont, à l'égard des familles de Bretagne, ceux qui prouvent qu'elles ont été comprises dans les réformations de la noblesse faites dans les XVe, XVIe et XVIIe siècles. À l'égard des nobles de la province de Normandie, ces titres sont ceux qui apprennent qu'ils ont été maintenus lors de la recherche des faux nobles, faite en 1463 par Remond Monfauf, et en 1598 et 1599 par M. de Boissy. À l'égard de la province du Dauphiné, les extraits des révisions de feux qui ont eu lieu, pendant les XIV, XV, XVI et XVIIe siècles ; et enfin, pour tous les gentilshommes du royaume, les arrêts, soit du conseil d'État, soit des commissaires généraux du conseil, et les jugements des commissaires départis dans les généralités du royaume pour la recherche des usurpateurs de noblesse, commencée en 1666, interrompue en 1674, et continuée en 1696 et années suivantes, qui ont maintenu leurs aïeux dans la possession de leur état.

Les actes civils, et portant qualification, sont les créations de tutelle et de curatelle, les garde-nobles, les partages, les transactions, les hommages, les aveux et dénombrements de fiefs, les ventes, les échanges, les contrats de mariage, les testaments, les inventaires après décès, etc.

Le caractère des qualifications nobles se tire de l'usage des provinces. La qualité de chevalier et d'écuyer est entièrement caractéristique de noblesse, dans tout le royaume, celle de noble dans les provinces de Flandres, Hainaut, Artois, Franche-Comté, Lyonnois, Chesle, Bugey, Dauphiné, Provence, Languedoc et Roussillon et dans l'étendue des parlements de Toulouse, Bordeaux et Pau ; celle de noble homme, en Normandie seulement.

Pour donner une base quelconque à la Preuve de noblesse, on exige donc, suivant la nature et l'étendue de la Preuve requise, pour les familles nobles d'ancienne extraction, un titre confirmatif de l'espèce de ceux que je viens de désigner ; et pour ceux dont les pères auraient été anoblis, le titre primordial de leur qualité.

À défaut de l'un de ces deux titres, il est d'usage de remonter la Preuve à l'année 1560, parce que, dans la recherche des faux nobles, faite dans le siècle dernier, le terme de la Preuve centenaire requise était fixé à cette époque, et il est certain qu'alors chacun restant davantage dans les bornes de sa condition, les usurpations n'étaient pas devenues encore aussi fréquentes : quand au lieu de joindre à la production le titre confirmatif de sa qualité, il a été vérifié au contraire, que la famille a été déclarée usurpatrice dans les recherches des faux nobles, on n'a nul égard à la possession qu'elle aurait continuée après le jugement de sa condamnation ; il ne lui reste alors d'autre moyen pour s'en relever, que de se pourvoir au conseil, et de remplir les conditions de la même Preuve qu'était tenu de faire l'auteur qui aurait été condamné. La Preuve devient alors une Preuve toute de rigueur ; c'est ce que l'on appelle Preuve de noblesse en matière contentieuse. L'on comprend en général, sous cette dénomination, toutes les Preuves faites par les familles pour être reconnues, maintenues, rétablies, réhabilitées dans leur noblesse.

Les Preuves se faisaient par titres. Ces titres devaient être originaux. On n'admettait aucunes copies collationnées, de quelques formalités qu'elles fussent revêtues.

On nomme actes originaux, savoir ; pour ceux passés devant notaire, les premières grosses délivrées sur les minutes par ceux-mêmes qui les ont reçues ; et pour les procès-verbaux de Preuves de noblesse, les arrêts et jugements de noblesse, les lettres, commissions et brevets de grades militaires, nominations et réceptions dans l'ordre de Saint-Louis, brevets et lettres de pension, et provisions des charges, les expéditions délivrées par les greffiers et autres personnes publiques à ce préposés. Chaque degré de la généalogie doit être établi par trois actes pour le XVIIIe siècle, le XVIIe et le XVIe, et par deux seulement pour les siècles antérieurs.

Quand les Preuves de noblesse sont parfaitement conformes à ce que je viens de dire, il n'existe qu'un seul moyen de les contester, qui est de démontrer la fausseté des titres produits. La fabrication des actes représentés se décèle bientôt, avec un peu d'attention, aux yeux d'un homme réellement exercé dans l'étude de la diplomatique, par des vices dans le style, l'orthographe et le caractère d'écriture, qui changent dans les actes de 50 en 50 ans, par la façon du parchemin, qui était anciennement plus fort et plus épais qu'il ne l'est aujourd'hui, et par la marque du papier qui n'a pas toujours été la même.

La malpropreté affectée des contrats, l'application des sceaux que l'on tire d'un acte vrai pour les attacher à des actes plus ou moins récemment fabriqués, les contradictions gui s'y trouvent s l'égard des temps, des lieux et des personnes, sont autant d'indices de supposition qui tombent facilement sous les sens, quand l'attention et l'impartialité se trouvent jointes.

On prétend que les généalogies n'ont commencé à être en usage que vers l'an 1600, auparavant on faisait les Preuves de noblesse par enquête.

En Allemagne et dans presque tout le Nord, où la multiplicité des chapitres nobles a rendu la noblesse attentive à ne se point mésallier, les Preuves se sont faites par de simples quartiers, qui sont de 16, 32 et 64, suivant que l'exigent les statuts de chaque chapitre.

En Angleterre, en Irlande et en Écosse, la noblesse se prouve par des tables généalogiques dans lesquelles sont cités les monuments qui servent de Preuves, et les générations autorisées des dates de l'existence des personnes qui les forment. Ces tables généalogiques, dressées par les rois d'armes de ces royaumes, sont certifiées par six ou huit gentilshommes des cantons et provinces, où la famille est domiciliée.

En Espagne, en Italie, en France, les Preuves de noblesse sont de l'espèce de celles que l'on appelle littérales, c'est-à-dire qu'elles se font par des titres de famille ; ce sont les plus sûres et les plus authentiques.

Preuves de noblesse, Voyez Arbre généalogique, Degrés, Généalogie, Quartiers.

d'après le Dictionnaire encyclopédique de la noblesse de France Nicolas Viton de Saint-Allais (1773-1842) — Paris, 1816